Les marchés publics, mode d’emploi
Les marchés publics, mode d’emploi
Comprendre un marché public et répondre aux appels d’offres.
Chef(fe) d’entreprise
Un marché public est un contrat administratif conclu à titre onéreux avec un ou plusieurs opérateurs économiques publics
ou privés pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services.
Qu’est ce qu’un marché public ?
A / Définition et conditions
1 DÉFINITION ET CADRE LÉGAL
Ce guide traite des marchés publics conclus par la Nouvelle-Calédonie, ses provinces et communes, leurs établissements publics et leurs groupements d’intérêt public, soumis à la délibération n°424 du 20 mars 2019 portant réglementation des marchés publics. Les marchés publics conclus par les services de l’État en Nouvelle-Calédonie font l’objet d’une réglementation spécifique (code de la commande publique et ses annexes).
Les marchés publics, dont l’appel d’offres est la procédure la plus communément utilisée, sont régis par la délibération n° 424 du 20 mars 2019 (disponible sur le site www.juridoc.gouv.nc pour tout achat de travaux, fournitures ou services pour un montant supérieur à 20 millions XPF hors taxes). Celle-ci fait office de Code des marchés publics et détaille la procédure de passation du marché.
Les acheteurs publics soumis à la délibération n°424 sont les suivants :
- La Nouvelle-Calédonie
- Les provinces
- Les communes
- Leurs établissements publics
- Leurs groupements d’intérêt public
Les marchés publics sont soumis au principe de libre accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures. (article 1er III. de la délibération n°424)
LE LIBRE ACCÈS À LA COMMANDE PUBLIQUE
Toute entreprise doit pouvoir se porter candidate à l’attribution d’un marché pour susciter une mise en concurrence effective. L’acheteur public ne peut limiter les candidatures au moyen de critères discriminatoires. Par exemple, en restreignant artificiellement le nombre de candidat par l’établissement d’un champ géographique ou en fonction de la nationalité du candidat.
L’ÉGALITÉ DE TRAITEMENT DES CANDIDATS :
La collectivité publique doit traiter tous les candidats sur un strict pied d’égalité et ce, à tout moment de la procédure de passation. L’application de ce principe garantit la bonne analyse des offres des candidats au moment de la sélection de l’attributaire et participe à la transparence de la procédure.
LA TRANSPARENCE DES PROCÉDURES :
La collectivité publique doit informer les candidats sur le déroulement de la procédure à chacune de ses phases. La personne publique est alors à même de justifier à tout moment les raisons des choix qui ont été faits, notamment par la production de pièces justificatives, ainsi que de tout autre document permettant de démontrer le caractère rationnel des choix opérés.
Ces principes justifient la soumission des marchés publics à des procédures de publicité et de concurrence. Ils permettent d’assurer l’efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics. Leur non-respect peut entraîner l’annulation par le juge de la procédure de marché, notamment suite à un recours exercé par un candidat non retenu.
B / Les acteurs du marché public
1 ACHETEUR PUBLIC
- Le maître d’ouvrage
Le maître d’ouvrage (ou maîtrise d’ouvrage, notée MOA) est la personne (personne morale publique) pour le compte de laquelle sont réalisées les prestations (travaux, services, fournitures courantes). Il en est le commanditaire et celui qui en supporte le coût financier.
- Le conducteur d’opération
Opérateur économique privé ou personne privée, le conducteur d’opération intervient auprès du maître d’ouvrage. Il a une mission générale à caractère technique, administratif et financier. Les missions de conduite d’opération sont incompatibles avec celle de maîtrise d’oeuvre.
- Le maître d’oeuvre
Le maître d’oeuvre est chargé de définir la solution et les moyens techniques que le titulaire du marché devra respecter pour réaliser la prestation en conformité avec le cahier des charges établi par la maîtrise d’ouvrage. Il remet les informations techniques aux candidats.
- La commission technique de dépouillement (CTD)
La CTD, émanation de la CAO, a pour mission de dépouiller les plis reçus et éliminer les plis arrivés hors délai, demander aux candidats de préciser ou compléter la teneur de leurs offres, régulariser des soumissions irrégulières et interroger les candidats lorsque l’offre semble anormalement basse. Elle contrôle également la présence de toutes les pièces demandées au
candidat.
- La commission d’appel d’offres (CAO)
La CAO entend l’analyse du maître d’oeuvre et propose à l’autorité exécutive du maître d’ouvrage de valider l’attribution du marché à l’entreprise présentant l’offre la plus avantageuse économiquement.
- La personne responsable du marché (PRM)
La PRM est la personne compétente pour passer les marchés publics nécessaires à la satisfaction des besoins de la structure publique qui l’emploie. Elle a reçu compétence de l’organe délibérant de cette structure et l’engage valablement.
2 OPÉRATEUR ÉCONOMIQUE
C’est l’organisme de droit public ou privé qui répond aux appels à candidatures lancés par le maître d’ouvrage. Le terme « opérateur économique » couvre à la fois les notions d’entrepreneur, fournisseur et prestataire de services. Il est utilisé uniquement dans un souci de simplification du texte. L’opérateur économique qui a présenté une offre est désigné par le mot « soumissionnaire » ou « candidat ».
C / Types de procédures rencontrées
On distingue plusieurs procédures :
LES MARCHÉ DE GRÉ À GRÉ
La procédure de gré à gré correspond à l’hypothèse où le marché public, compte tenu de ses caractéristiques propres est soit passé par le biais d’une mise en compétition au moins sommaire (3 cas limitativement énumérés à l’article 35-1) ; soit sans mise en compétition car elle serait manifestement inadaptée (8 cas limitativement énumérés par l’article 35-2). En dehors de ces cas, l’acheteur public ne peut avoir recours au marché de gré à gré.
LES PROCÉDURES FORMALISÉES
Ces dernières sont de plusieurs formes :
- Pour les achats supérieurs à 20 M XPF HT, les appels d’offres (articles 24 et Ss. délibération 136/ CP) ouverts ou restreints.
- Les autres types de procédures : l’appel d’offres avec concours (articles 29 et Ss. délibération 136/CP), le dialogue compétitif (articles 32-1 et Ss. délibération 136/CP).
D / Types de marchés publics
Un marché public peut prendre plusieurs formes. Il est important que la collectivité ou l’établissement public définisse correctement ses besoins car cela déterminera la façon dont les entreprises peuvent y répondre.
INCERTITUDE SUR LA RÉALISATION DES PRESTATIONS : LES MARCHÉS FRACTIONNÉS
- Marché à bon de commande (MBC) avec mini-maxi :
Il s’agit d’un marché qui peut prévoir les quantités ou les montants minimaux ou maximaux susceptibles d’être commandés au cours de la période d’exécution du marché. La conséquence juridique de ce type de marché est que la définition d’un minimum entraîne pour un titulaire unique, lorsque ce minimum n’a pas été commandé à la fin de l’exécution du marché, un droit à indemnisation sur la marge bénéficiaire,ainsi que les frais d’investissements éventuels, concernant les prestations qui restaient à exécuter pour atteindre ce minimum.
Le marché à bon de commande constitue une exception à l’obligation pour l’acheteur public de déterminer aussi exactement que possible la consistance des prestations avant tout appel à la concurrence.
- Marché à tranches fermes ou conditionnelles :
Ce type de marché est généralement mis en place quand la personne de droit public a quelques incertitudes financières sur la
réalisation à terme de l’ensemble des prestations. On trouve donc une tranche ferme (prestations qui seront effectuées avec certitude) et une (ou des) tranche(s) conditionnelle(s). Un délai est mis en place pour savoir si les tranches conditionnelles seront exécutées : on parle alors d’ « affermissement ». L’entreprise candidate doit répondre aux deux types de tranches. Elle a cependant le droit de prendre une marge de sécurité financière plus importante pour la tranche conditionnelle.
- Marchés reconductibles :
Sauf stipulations contraires, la reconduction d’un marché nécessite un accord exprès des parties. La durée totale d’un marché reconductible, qui ne peut excéder quatre ans, tient compte de la nature des prestations et de la nécessité d’une remise en
concurrence périodique.
- Marchés-cadres :
Ce sont des contrats conclus avec un ou plusieurs opérateurs économiques ayant pour objet d’établir les termes régissant les marchés subséquents. Ces derniers précisent les caractéristiques et les modalités d’exécution des prestations demandées qui n’ont pas été fixées dans le marché cadre. La durée maximale de ces marchés-cadres est de quatre ans.
ALLOTISSEMENT
- Marché à lots :
Un lot équivaut à un marché. Ainsi, une distinction sur la nature des besoins est faite en amont afin de déterminer un lot par
besoin. Ce type de marché a un certain nombre d’avantages économiques, notamment la possibilité de faire appel à des corps de métiers différents et spécialisés dans leur domaine, la possibilité de donner leur chance à des petites entreprises, etc.
Cela favorise également la concurrence et a donc un impact sur les prix. Cependant, la pluralité d’intervenants peut parfois poser quelques problèmes en termes d’organisation et de responsabilité.
DISTINCTION SUIVANT LE MODE D’ÉTABLISSEMENT DES PRIX
- Marché à prix forfaitaires :
Ce type de marché s’applique pour les marchés de travaux de technique courante comme la peinture d’un établissement, par exemple. Le prix est fixé au départ et « en bloc ».
- Marché à prix unitaires :
Le prix du marché est fixé a posteriori en fonction des quantités réellement commandées. Ceci s’applique habituellement pour les fournitures courantes et services.
- Marché à prix mixtes :
Il s’agit d’un cumul des deux natures de prix précédents.
Comment répondre à un marché public ?
A / Je lis un avis d’appel public à la concurrence
1 COMBIEN DE TEMPS AI-JE POUR Y RÉPONDRE ?
En cas d’appel d’offres ouvert, procédure la plus communément utilisée, le délai minimum de réception des offres est de 20 jours calendaires à compter de la date de publication. L’acheteur public peut cependant décider d’octroyer un délai plus long.
La date limite est obligatoirement mentionnée sur l’avis. Dans le cas des marchés de gré à gré, il n’existe pas de contraintes réglementaires : le maître d’ouvrage définit lui-même le délai laissé aux entreprises pour présenter leur réponse. Pour les autres procédures : se référer à la délibération n°424.
2 QUELLE STRATÉGIE ADOPTER EN MATIÈRE DE RÉPONSE : RÉPONDRE SEUL OU À PLUSIEURS ?
RÉPONDRE SEUL (MISE EN FORME SPÉCIALE)
Le maître d’ouvrage me le permet-il dans le règlement public d’appel d’offres ?
Ai-je les moyens financiers, techniques et humains pour y répondre ?
Ai-je les références pour certifier au maître d’ouvrage ma capacité à faire ?
RÉPONDRE À PLUSIEURS (MISE EN FORME SPÉCIALE)
Deux possibilités se présentent à vous lorsque vous souhaitez répondre à plusieurs :
LA CO-TRAITANCE
L’entreprise sera co-titulaire au sein d’un groupement d’entreprises. Le groupement d’entreprises, dont la durée est momentanée, peut se faire de deux façons :
- Groupement conjoint
Chaque entreprise s’engage à exécuter la prestation qui lui est reconnue au sein du groupement. Elle ne peut pas être obligée à exécuter la prestation d’un autre membre du groupement.
- Groupement solidaire
Chacun des membres du groupement est engagé financièrement par la totalité du marché. En cas de défaillance de l’un d’entre eux, les autres doivent être en mesure de réaliser sa prestation. Quelque soit le groupement retenu, un mandataire est désigné parmi ses membres afin de les représenter auprès du maître d’ouvrage. Généralement, le mandataire est l’entreprise qui a le plus gros lot, soit le lot 1. L’étendue de ses responsabilités est définie dans les pièces du marché.
LA SOUS-TRAITANCE
La sous-traitance à 100 % est interdite. Cependant, il est tout à fait possible de sous-traiter une partie du contrat que l’entreprise a obtenu. En effet, un tiers peut effectuer une partie du marché relatif à des services placés sous la responsabilité
du titulaire. L’entreprise titulaire doit penser à déclarer le sous-traitant au maître d’ouvrage pour agrément soit au moment du dépôt de candidature, soit au cours du déroulement du marché. Le paiement du sous-traitant se fait, selon le montant sous-traité, par le biais de l’entreprise titulaire ou directement par l’acheteur public, en fonction des montants.
B / Je retire et j’étudie le dossier de consultation
Pièce centrale, le dossier de consultation des entreprises (DCE) se retire généralement auprès de l’organisme qui émet le marché. Cependant, l’envoi est également possible. Ce dossier peut être payant si, par exemple, il comporte une pluralité de plans. Avec la dématérialisation des marchés publics, obligatoire pour les marchés à partir de 40 millions de francs HT, il pourra être téléchargé sur une plateforme dématérialisée.
L’AVIS D’APPEL PUBLIC À LA CONCURRENCE (AAPC) OU AVIS D’APPEL D’OFFRES
- L’objet du marché
- les modalités par lesquelles tout intéressé peut prendre connaissance des documents de la consultation
- les modalités ainsi que la date et l’heure limite de réception des soumissions.
LE RÈGLEMENT PUBLIC D’APPEL D’OFFRES (RPAO) OU RÈGLEMENT DE CONSULTATION
Il est fortement conseillé au candidat de lire attentivement ce document capital, malheureusement trop souvent ignoré des entreprises. Il explique les règles à respecter pour répondre à l’appel d’offres.
L’ACTE D’ENGAGEMENT
L’acte d’engagement est le document contractuel par lequel le candidat s’engage sur son offre. Cet acte présente l’identité de l’entreprise et son statut, c’est-à-dire une entreprise unique ou un groupement. Le montant de l’offre de l’entreprise est également présenté, ainsi que la déclaration des sous-traitants éventuels.
LE BORDEREAU DE PRIX UNITAIRE (BPU)
Le BPU est notamment utilisé dans les marchés à bons de commande. Il liste les prix unitaires relatifs à chaque produit ou élément d’ouvrage prévu par le cahier des charges.
LA DÉCOMPOSITION DU PRIX GLOBAL ET FORFAITAIRE (DGPF)
Dans le cas d’un prix forfaitaire indiqué dans l’acte d’engagement, la DPGF est destinée à fournir le détail du prix forfaitaire correspondant.
LE CAHIER DES CHARGES
Il détermine les conditions dans lesquelles les marchés sont exécutés. Il peut comprendre des documents généraux et particuliers.
Les documents généraux peuvent être :
- le cahier des clauses administratives et générales (CCAG) qui fixe les dispositions administratives applicables à toute catégorie de marchés
- le cahier des clauses techniques et générales (CCTG) qui fixe les dispositions techniques applicables à toutes prestations d’une même nature.
Les documents particuliers peuvent être :
- le cahier des clauses administratives particulières (CCAP) qui fixe les dispositions administratives propres à chaque marché (modalités d’exécution, pénalités, découpage, etc.).
- le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) qui fixe les dispositions techniques nécessaires à l’exécution des prestations prévues au marché. Ces stipulations donnent une description précise des prestations à réaliser et permettent à la personne responsable de suivre le déroulement du marché et la bonne exécution de ces prestations.
INTÉRÊT DU MÉMOIRE TECHNIQUE
Le mémoire technique est une pièce qui peut être demandée aux candidats à un marché public à l’appui de leur offre. Les dispositions qui figurent dans la trame correspondent aux éléments sur lesquels le maître d’ouvrage pourra s’appuyer pour
attribuer une note aux opérateurs économiques dans le cadre du critère de la valeur technique de l’offre.
C / Je prépare mon offre
- Je m’assure de disposer des documents officiel demandés : attestations fiscales et sociales, extrait Kbis…
- Je complète les différents documents demandés
Le plus souvent, il s’agit de l’acte d’engagement et du BPU. Pour ce dernier, je détermine mes prix seul ou avec l’aide de mes co-traitants. Pour obtenir des renseignements complémentaires qui pourraient vous être utiles pour l’étude de l’offre, un contact vous est donné dans le RPAO (rubrique « demande de renseignements »). L’information transmise par ce canal doit obligatoirement être communiquée à l’ensemble des entreprises ayant retiré un dossier. Dans le cas contraire, le principe d’égalité entre les candidats n’est plus respecté.
D / Je rends le dossier
Les pièces constitutives du dossier final sont à ranger dans l’enveloppe.
Dans l’enveloppe, on trouve (liste non exhaustive) :
- Pour le soumissionnaire et ses sous-traitants : déclaration d’intention de soumissionner incluant une déclaration sur l’honneur indiquant qu’il est en situation régulière au regard des obligations fiscales et sociales exigibles à la date de la soumission et qu’il n’est pas en situation d’incapacité juridique à soumissionner
- Si le règlement le prévoit :
- une note sur les moyens techniques et/ou humains en rapport avec l’objet du marché
- Éléments relatifs à la capacité ou à la solidité financière de l’entreprise (CA, bilan comptable, etc.)
- Références des prestations en rapport avec l’objet du marché
- Toutes autres pièces relatives à ses obligations légales ou à l’habilitation des personnes
E / Je me renseigne sur la réglementation applicable pour l’exécution du marché
Lorsqu’on est titulaire d’un marché public, il est essentiel de maîtriser la réglementation applicable pour l’exécution du marché.
Si la délibération n°424 encadre les règles de passation des marchés publics, c’est une délibération fixant les cahiers des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux et aux marchés publics de fournitures courantes et de services qui sert de référence en général pour l’exécution du marché.